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Table of Contents
  1. Que signifie exactement « progrès »?
  2. Pourquoi le bonheur ne suit-il pas la courbe du PIB?
  3. Les philosophes sont-ils d’accord sur ce diagnostic?
  4. Comment le progrès transforme-t-il concrètement nos vies?
  5. Faut-il renoncer au progrès pour être heureux?
  6. Les circonstances du bonheur
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  • Questions philosophiques

Le progrès rend-il vraiment plus heureux ?

  • 14/10/2025
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Nous vivons plus longtemps, mieux soignés, mieux informés que nos ancêtres. Pourtant, les indicateurs de bien-être stagnent ou reculent dans de nombreux pays développés. Cette tension entre amélioration matérielle et satisfaction subjective interroge l’une des croyances centrales de la modernité : l’idée que progrès technique et bonheur avancent main dans la main.


Un ingénieur de la Silicon Valley gagne 200 000 dollars par an, habite un appartement climatisé, consulte son médecin en visioconférence et commande ses courses d’un clic. Son arrière-grand-père, paysan dans le Midwest, triavaillait quinze heures par jour sans eau courante ni antibiotiques. Objectivement, un abîme sépare ces deux vies. Subjectivement, les enquêtes de satisfaction ne montrent aucun écart significatif. L’ingénieur se plaint de burn-out, de solitude numérique, d’anxiété. Le paysan, selon les témoignages d’époque, se plaignait de la dureté du travail, de l’isolement hivernal, de la peur de la maladie. Deux misères différentes mais un niveau de contentement comparable.

Cette observation n’est pas anecdotique. Elle structure l’un des débats philosophiques les plus tenaces depuis deux siècles : le progrès matériel, scientifique et technique — cette accumulation de savoirs et de capacités qui définit la modernité — produit-il davantage de bonheur humain ? La question traverse l’économie du développement, la psychologie positive, l’éthique environnementale et les politiques publiques. Elle oppose ceux qui voient dans l’innovation la clé du bien-être à ceux qui dénoncent une fuite en avant destructrice.

Cet article examine les arguments philosophiques de cette controverse, dégage les mécanismes qui expliquent le décalage entre progrès et bonheur, et explore les implications pour nos choix collectifs.

En 2 minutes

Le progrès technique améliore les conditions matérielles sans garantir une hausse proportionnelle du bonheur ressenti.

L’adaptation hédonique fait que nous nous habituons rapidement aux améliorations, ramenant notre satisfaction à son niveau de base.

Les comparaisons sociales relatives pèsent souvent plus que les gains absolus dans notre perception du bien-être.

Les philosophes divergent : les utilitaristes misent sur l’optimisation continue, les critiques du progrès pointent ses effets pervers.

La question n’est pas d’arrêter le progrès mais de définir quel type de progrès sert réellement le bien-être humain.

Que signifie exactement « progrès »?

Le terme « progrès » désigne une amélioration cumulative et orientée dans un domaine donné. En philosophie moderne, depuis les Lumières, il renvoie principalement à trois dimensions : le progrès scientifique (accumulation de connaissances vérifiables), le progrès technique (augmentation des capacités d’action sur le monde) et le progrès moral ou social (extension des droits, réduction des violences, amélioration des conditions de vie…).

Prenons un exemple simple : l’espérance de vie mondiale est passée de 30 ans en 1800 à 73 ans en 2020. Cette augmentation résulte d’innovations sanitaires, médicales et agricoles mesurables. C’est du progrès au sens strict : une transformation irréversible qui élargit nos possibilités. Personne ne conteste ce gain objectif. La question philosophique commence quand on demande : cette vie plus longue est-elle nécessairement plus heureuse ?

Condorcet, dans son Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain (1795), défendait l’idée que le développement des sciences et de la raison conduirait mécaniquement à l’amélioration du bonheur collectif. Pour lui, « la nature n’a marqué aucun terme au perfectionnement des facultés humaines ». Cette confiance s’appuyait sur l’observation des gains matériels évidents apportés par la révolution scientifique et les débuts de l’industrialisation.

Mais dès le XIXe siècle, des voix dissidentes émergent. Rousseau avait déjà, au siècle précédent, distingué le développement des arts et des sciences de l’amélioration morale, suggérant que le premier pouvait corrompre la seconde. Plus tard, des penseurs comme John Stuart Mill reconnaissent que le bonheur dépend de facteurs qualitatifs irréductibles au seul confort matériel.

Notions clés

Progrès : amélioration cumulative et mesurable dans un domaine (science, technique, droits).

Bonheur : état subjectif de satisfaction durable, distinct du plaisir ponctuel.

Adaptation hédonique : processus psychologique par lequel nous nous habituons aux améliorations, ramenant notre satisfaction à un niveau de base.

Comparaison sociale : tendance à évaluer notre bien-être relativement à celui d’autrui plutôt qu’en termes absolus.

Utilitarisme : doctrine morale qui définit le bien par la maximisation du bonheur collectif.

Pourquoi le bonheur ne suit-il pas la courbe du PIB?

L’énigme moderne tient en quelques chiffres : entre 1950 et 2020, le PIB par habitant a été multiplié par quatre dans les pays occidentaux. Les taux de satisfaction déclarée, eux, ont stagné. Ce paradoxe, formalisé par l’économiste Richard Easterlin dans les années 1970, s’appelle désormais « paradoxe d’Easterlin » ou « paradoxe du bonheur« .

La psychologie comportementale offre une première explication : l’adaptation hédonique. Nous nous habituons rapidement à toute amélioration. L’achat d’une voiture neuve procure une satisfaction intense pendant quelques semaines, puis devient la nouvelle normalité. Le niveau de bonheur retourne à sa base. Ce mécanisme, étudié par les psychologues Daniel Kahneman et Amos Tversky, montre que notre système d’évaluation subjective fonctionne davantage par écarts relatifs que par niveaux absolus.

Imaginez une roue de hamster qui s’accélère : vous courez plus vite, mais restez au même endroit. C’est exactement ce qui se passe avec le progrès matériel. Nous gagnons en capacités, mais notre seuil d’aspiration croît au même rythme. Ce qui était luxe hier devient nécessité aujourd’hui. L’eau courante, impensable pour 90 % de l’humanité en 1900, est désormais pour la plupart un droit élémentaire dont l’absence constitue une privation insupportable.

Deuxième mécanisme : les comparaisons sociales. Le sociologue Thorstein Veblen, dans Théorie de la classe de loisir (1899), montrait que la consommation sert autant à signaler un statut relatif qu’à satisfaire des besoins absolus. Peu importe que votre voiture soit objectivement meilleure que celle de 1950 si elle reste inférieure à celle de votre voisin. Le philosophe John Rawls, dans Théorie de la justice (1971), insiste sur cette dimension positionnelle du bien-être : ce qui compte n’est pas tant mon niveau absolu de richesse que ma position relative dans la distribution.

Une étude classique illustre ce point. Des chercheurs ont demandé à des participants de choisir entre deux scénarios : gagner 50 000 dollars par an quand la moyenne est à 25 000, ou gagner 100 000 quand la moyenne est à 200 000. La majorité choisit le premier scénario, préférant un revenu absolu inférieur mais une position relative supérieure. Le bonheur dépend moins de ce que j’ai que de ce que j’ai par rapport aux autres.

Troisième facteur : les effets secondaires du progrès. L’accélération technique génère de l’instabilité, de l’obsolescence rapide des compétences, de l’anxiété face au changement. Le philosophe allemand Hartmut Rosa, dans Accélération (2010), montre que le gain de temps produit par les innovations (transports rapides, communications instantanées) ne se traduit pas par davantage de temps libre, mais par une densification des activités et une impression croissante de manque de temps. Nous sommes plus productifs, mais plus pressés et plus fatigués.

Les philosophes sont-ils d’accord sur ce diagnostic?

La relation entre progrès et bonheur divise profondément les traditions philosophiques.

Les utilitaristes, héritiers de Jeremy Bentham et John Stuart Mill, maintiennent que le progrès technique reste le meilleur outil pour maximiser le bonheur collectif. Mill, dans L’utilitarisme (1861), distingue les plaisirs supérieurs (intellectuels, moraux) des plaisirs inférieurs (sensoriels). Pour lui, le progrès éducatif et culturel élève la qualité du bonheur humain.

Peter Singer, philosophe contemporain, défend une position similaire : les gains en santé, longévité et réduction de la pauvreté constituent des améliorations indiscutables du bien-être, même si les enquêtes de satisfaction ne les reflètent qu’imparfaitement. L’erreur serait de confondre bonheur déclaré et bien-être réel : une personne peut se dire heureuse dans l’ignorance, la maladie ou l’oppression, sans que ce contentement subjectif soit souhaitable.

Les critiques du progressisme, inspirés par Rousseau, Schopenhauer ou la tradition romantique, contestent l’équation progrès-bonheur. Rousseau, dans le Discours sur les sciences et les arts (1750), soutenait que le développement des arts et des sciences avait corrompu les mœurs plutôt que de les améliorer. L’homme naturel, selon lui, vivait dans une simplicité heureuse que la civilisation a détruite. Schopenhauer, plus radical, voyait dans le progrès technique une illusion : puisque le désir humain est insatiable, multiplier les moyens de le satisfaire ne fait qu’intensifier la frustration.

Les existentialistes, comme Albert Camus ou Jean-Paul Sartre, déplacent la question. Pour eux, le bonheur n’est pas l’objectif pertinent. Ce qui compte, c’est l’authenticité, la liberté, le sens. Le progrès matériel peut même nuire à ces valeurs en créant des sociétés de confort où l’individu se dissout dans la masse, abdique sa responsabilité, fuit l’angoisse existentielle dans le divertissement. Camus, dans Le mythe de Sisyphe (1942), montre que le bonheur absurde — celui de Sisyphe imaginé heureux malgré l’absurdité de sa tâche — ne dépend nullement des conditions matérielles.

Les philosophes du « care » et de la reconnaissance, comme Axel Honneth ou Martha Nussbaum, proposent une voie médiane. Ils reconnaissent l’importance des capacités matérielles (ce que Nussbaum appelle les « capabilities ») tout en insistant sur les dimensions relationnelles du bien-être. Dans Capabilités (2011), Nussbaum liste dix capacités fondamentales — vie, santé, intégrité corporelle, sens, émotions, raison pratique, affiliation, relation à la nature, jeu, contrôle sur son environnement — qui constituent le socle du bien-être humain. Le progrès technique n’est bénéfique que s’il renforce ces capacités sans détruire les relations sociales et écologiques qui les soutiennent.

Enfin, les décroissants et critiques écologiques, héritiers d’Ivan Illich et André Gorz, affirment que le progrès industriel a dépassé un seuil de contre-productivité. Au-delà d’un certain point, l’accumulation technique détruit plus de bien-être qu’elle n’en crée : pollution, épuisement des ressources, destruction des liens communautaires, artificialisation du monde. Illich, dans La convivialité (1973), distingue les outils conviviaux (qui accroissent l’autonomie) des outils productivistes (qui créent la dépendance). Pour ces penseurs, le bonheur exige non pas plus de progrès, mais un progrès différent, orienté vers la sobriété, la résilience et la qualité des relations.

Ces positions divergentes ne s’excluent pas totalement. Elles pointent des aspects différents d’une réalité complexe. Le progrès médical réduit la souffrance (argument utilitariste). Il crée aussi de nouvelles anxiétés (surdiagnostic, médicalisation de l’existence). Il peut renforcer l’autonomie (accès à la contraception) ou la miner (dépendance aux industries pharmaceutiques). Tout dépend du type de progrès et du contexte social dans lequel il s’inscrit.

Comment le progrès transforme-t-il concrètement nos vies?

Prenons trois domaines où le progrès technique a profondément modifié l’expérience humaine : la communication, le travail et la santé.

Communication. En 1990, téléphoner à l’étranger pouvait coûter plusieurs dizaine de francs la minute (équivalent de plusieurs euros) et nécessitait de passer par un opérateur. Aujourd’hui, la visioconférence et les appels par internet sont gratuits et instantanés. Gain objectif : les familles séparées restent en contact, les collaborations internationales se multiplient, l’accès à l’information explose. Coût subjectif : disponibilité permanente, dilution de l’attention, perte des temps morts nécessaires à la réflexion. Les téléphones de naguère étant devenus des smartphones, ils changent de fonction et deviennent un objet que l’on emporte sur soi et nous permet de rester en contact permanent avec l’information, quelle que soit la qualité de cette dernière. Des études récentes montrent une corrélation entre usage intensif des réseaux sociaux et augmentation de l’anxiété, particulièrement chez les jeunes. Le progrès technique a créé simultanément plus de possibilités et plus de pression.

Travail. L’automatisation a supprimé les tâches les plus pénibles physiquement. Un ouvrier de 2025 porte moins (les sacs de ciment, par exemple, sont passés de 50 kg à 35 kg maximum), se blesse moins, travaille dans des conditions plus sûres qu’en 1925. Mais les études sur la satisfaction au travail ne montrent pas d’amélioration nette. Pourquoi ? Parce que la pénibilité physique a été remplacée par une intensification cognitive et émotionnelle : charge mentale, rythmes imposés par les machines, précarisation, perte du sens du travail bien fait. Le sociologue Richard Sennett, dans Ce que sait la main (2008), montre comment le progrès technique a dévalorisé le savoir-faire artisanal, source majeure de fierté et d’accomplissement. L’ouvrier qui maîtrisait son outil en tirait une satisfaction que le salarié interchangeable d’une chaîne automatisée ne connaît plus. De même, un ouvrier plaquiste qui pose toute la journée des plaques de Placoplâtre ne mobilise pas la même technicité et ne bénéficie pas du même sentiment de sens qu’un ouvrier plâtrier d’antan qui travaillait à la filasse et au plâtre de Paris.

Santé. L’espérance de vie a doublé, les maladies infectieuses ont reculé, la mortalité infantile s’est effondrée. Ces victoires sont indiscutables. Pourtant, les sociétés modernes connaissent une explosion des pathologies chroniques (diabète, obésités, dépressions, maladies auto-immunes) largement liées au mode de vie généré par le progrès industriel : sédentarité, alimentation ultra-transformée, stress permanent, pollution. Le médecin et anthropologue Didier Fassin parle de « santé globale » : nous vivons plus longtemps, mais avec plus d’années de maladies. La qualité de ces années gagnées est questionnée : que penser des séjours prolongés en EHPAD, établissements qui ont été largement commentés récemment en raison de leurs pratiques de maximisation du profit au détriment du bonheur des patients?

Ces exemples illustrent un schéma récurrent : le progrès technique résout des problèmes anciens en créant des problèmes nouveaux. Le bilan net dépend de la façon dont nous pesons les gains et les pertes, exercice qui engage des choix de valeurs irréductibles à un calcul objectif.

Faut-il renoncer au progrès pour être heureux?

Cette conclusion serait absurde. Personne ne souhaite sérieusement revenir à la mortalité infantile du Moyen Âge ou à l’absence d’anesthésie. Le problème n’est pas le progrès en soi, mais le type de progrès que nous poursuivons et les critères qui l’orientent.

L’erreur des Lumières, selon le philosophe John Gray dans Les chiens de paille (2002), fut de croire que le progrès moral suivrait automatiquement le progrès technique. L’histoire du XXe siècle — génocides industriels, armes de destruction massive, catastrophes écologiques — a démenti cette confiance. La technique amplifie nos capacités sans déterminer nos fins. Elle peut servir l’émancipation ou la domination, le soin ou la destruction.

Le vrai débat porte donc sur la direction du progrès. L’économiste Amartya Sen, prix Nobel en 1998, propose de mesurer le développement non par le PIB mais par l’expansion des libertés réelles des individus. Un progrès authentique serait celui qui augmente les choix significatifs accessibles aux personnes : être éduqué, en bonne santé, protégé de la violence, capable de participer à la vie collective. Dans cette perspective, certaines innovations techniques accroissent ces libertés (contraception, alphabétisation, vaccination) tandis que d’autres les réduisent (surveillance numérique, obsolescence programmée, dépendance aux plateformes).

Les philosophes pragmatistes, comme John Dewey, suggèrent une approche expérimentale : tester les innovations, évaluer leurs effets concrets sur le bien-être, corriger le tir. Dewey, dans Le public et ses problèmes (1927), insiste sur l’importance de la délibération collective. Le progrès souhaitable ne peut être défini par des experts en chambre, mais doit émerger d’un débat démocratique où les citoyens pèsent ensemble les gains et les coûts des transformations techniques.

Cette approche reconnaît la pluralité des conceptions du bonheur. Pour certains, le bonheur réside dans l’autonomie et la maîtrise technique. Pour d’autres, dans la simplicité et l’harmonie avec la nature. Pour d’autres encore, dans les relations interpersonnelles ou la contemplation spirituelle. Aucune innovation technique n’améliore simultanément toutes ces dimensions. L’introduction de l’automobile accroît la mobilité mais augmente aussi le bruit. Internet élargit l’accès au savoir mais fragmente l’attention. Le progrès implique toujours des arbitrages.

La philosophe politique Hannah Arendt, dans Condition de l’homme moderne (1958), met en garde contre la confusion entre progrès et processus automatique. Pour elle, le propre de l’action humaine est d’initier du nouveau, de commencer quelque chose d’imprévisible. Réduire le progrès à une simple extrapolation des tendances actuelles — toujours plus vite, plus grand, plus efficace — revient à abdiquer cette capacité d’initiative. Le bonheur ne viendra pas d’un progrès subi passivement, mais d’un progrès choisi activement, orienté par des valeurs explicites et ajustable en fonction de ses effets observés.

Les circonstances du bonheur

L’ingénieur de la Silicon Valley et son arrière-grand-père paysan partagent finalement quelque chose d’essentiel : une vie humaine finie, traversée par l’espoir et la déception, la joie et la peine, l’attachement et la perte. Les outils changent, les structures sociales se transforment, mais la condition fondamentale demeure. Le progrès technique modifie les circonstances du bonheur sans garantir le bonheur lui-même.

Cela ne signifie pas que le progrès soit vain. Vivre 75 ans en bonne santé vaut mieux que mourir à 35 ans de dysenterie. Accéder à l’éducation et à la culture élargit l’expérience humaine, tout comme la réduction des violences et l’extension des droits constituent des acquis précieux. Mais ces gains matériels ou quasi-matériels ne suffisent pas. Le bonheur dépend aussi de dimensions non techniques : qualité des relations, sentiment d’appartenance, perception de sens, capacité à se projeter dans l’avenir sans anxiété paralysante.

La question « pour ou contre le progrès » serait donc une alternative simpliste qui bloque la réflexion. La question à se poser : quel progrès, pour qui, selon quels critères, avec quelles précautions ? Un progrès qui détruit les liens sociaux, épuise la planète et génère de l’anxiété permanente n’est pas souhaitable, quels que soient ses gains de productivité. Inversement, un progrès qui réduit la souffrance, accroît l’autonomie et préserve les conditions d’une vie digne mérite d’être poursuivi.

Il faut donc avant tout se demander quel type de progrès voulons-nous vraiment. Cette question fondamentale, politique et éthique, ne trouve pas de réponse définitive dans les statistiques économiques ni dans les algorithmes d’optimisation. Elle exige un débat collectif permanent, nourri par l’expérience vécue et guidé par une réflexion critique sur nos valeurs. Cet exercice démocratique et jamais achevé est le moyen de situer le véritable progrès : non pas dans l’accumulation indéfinie de moyens, mais dans une délibération patiente sur ses fins.

Sur le sujet

Théorie de la justice, John Rawls (1971) — analyse de la dimension positionnelle du bien-être

Capabilités, Martha Nussbaum (2011) — approche par les capacités fondamentales

Accélération, Hartmut Rosa (2010) — critique de l’accélération sociale

La convivialité, Ivan Illich (1973) — distinction entre outils conviviaux et contre-productifs

Condition de l’homme moderne, Hannah Arendt (1958) — réflexion sur l’action humaine et le sens du progrès

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