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Bon sens

  • 20/09/2025
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Définition

Le bon sens désigne la faculté naturelle de bien juger, la capacité spontanée de discerner le vrai du faux et le convenable de l’inconvenant sans recours à des raisonnements savants. Cette notion exprime l’idée d’une sagesse pratique commune, accessible à tous, qui guide l’action quotidienne par des évidences partagées.

Le bon sens articule universalité de la raison et simplicité du jugement, constituant une forme de connaissance immédiate qui précède et fonde souvent les élaborations théoriques.

Les Origines Antiques

Aristote et la Phronesis

Aristote développe dans l’Éthique à Nicomaque le concept de phronesis (prudence, sagesse pratique) qui préfigure le bon sens moderne. Cette vertu intellectuelle permet de délibérer correctement sur les affaires humaines.

La phronesis articule universaux rationnels et situations particulières, révélant une forme de connaissance pratique irréductible à la science théorique.

Le Sensus Communis

Aristote introduit aussi la notion de sensus communis (sens commun) comme faculté qui unifie les données des cinq sens. Cette fonction cognitive inspire ultérieurement la réflexion sur le bon sens.

Les Stoïciens et la Raison Commune

Les Stoïciens développent l’idée d’une raison universelle (logos koinos) qui se manifeste dans le jugement naturel de tout homme. Cette conception influence la notion moderne de bon sens.

Thomas d’Aquin et le Sens Commun

Thomas d’Aquin distingue dans la Somme théologique plusieurs sens du « sens commun » :

Le Sens Commun Cognitif

Faculté interne qui unifie et compare les perceptions sensorielles, permettant de distinguer le blanc du doux.

Le Sens Commun Pratique

Capacité naturelle de juger du bien et du mal moral sans formation philosophique particulière. Cette notion préfigure la conscience morale naturelle.

La Renaissance et l’Humanisme

Montaigne et la Sagesse Ordinaire

Michel de Montaigne valorise dans les Essais une forme de sagesse naturelle opposée aux subtilités scolastiques. « La plus part de nos vacations sont farcesques » : le bon sens révèle la vanité des prétentions savantes.

L’Éloge de l’Ignorance Socratique

Montaigne retrouve l’ironie socratique : la véritable sagesse reconnaît les limites du savoir humain et s’en tient aux évidences du bon sens.

Descartes et la Raison Naturelle

René Descartes ouvre le Discours de la méthode par la célèbre affirmation : « Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée. »

L’Universalité de la Raison

Pour Descartes, tous les hommes possèdent également la faculté de distinguer le vrai du faux. Les différences d’opinion proviennent non de l’inégalité des esprits mais de la diversité des méthodes.

La Méthode et le Bon Sens

Le bon sens naturel ne suffit pas : il faut le diriger par une méthode rigoureuse pour éviter l’erreur. La méthode cartésienne discipl ine et perfectionne le bon sens spontané.

La Critique de l’Évidence

Paradoxalement, Descartes se méfie des évidences du bon sens (perception sensible, existence du monde) et les soumet au doute méthodique.

Pascal et l’Esprit de Finesse

Blaise Pascal oppose dans les Pensées l’esprit géométrique à l’esprit de finesse qui s’apparente au bon sens.

L’Esprit de Finesse

« Dans l’esprit de finesse, les principes sont dans l’usage commun et devant les yeux de tout le monde… mais il faut avoir la vue bien nette pour les voir, et de plus, l’esprit juste pour ne pas raisonner faussement sur des principes connus. »

Le Cœur et la Raison

« Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. » Pascal distingue l’ordre de la charité, accessible au bon sens du cœur, de l’ordre géométrique.

Les Trois Ordres

Pascal hiérarchise corps, esprit et charité. Le bon sens relève de l’ordre du cœur qui transcende l’ordre purement rationnel.

Les Philosophes Écossais

Thomas Reid et la Philosophie du Sens Commun

Thomas Reid (1710-1796) fonde l’École écossaise du sens commun dans Inquiry into the Human Mind. Il critique le scepticisme humien au nom des évidences du sens commun.

Les Principes du Sens Commun

Reid identifie des principes premiers indémontrables mais universellement acceptés :

  • L’existence du monde extérieur
  • La fiabilité de la mémoire
  • L’identité personnelle
  • La causalité naturelle

La Critique de l’Empirisme

Reid montre que l’empirisme de Locke et Hume détruit paradoxalement le sens commun en réduisant la connaissance aux seules sensations.

Dugald Stewart et la Diffusion

Dugald Stewart (1753-1828) popularise la philosophie du sens commun et influence l’enseignement philosophique anglo-saxon.

Vico et la Sagesse Poétique

Giambattista Vico développe dans la Science nouvelle une conception historique du sens commun comme « sagesse poétique » des peuples primitifs.

Le Sens Commun des Nations

Vico définit le sens commun comme « jugement sans réflexion, communément ressenti par tout un ordre, par tout un peuple, par toute une nation, ou par tout le genre humain. »

L’Évolution Historique

Le sens commun évolue à travers les âges de l’humanité (divin, héroïque, humain), révélant la Providence dans l’histoire.

Kant et le Sensus Communis Esthétique

Emmanuel Kant renouvelle la notion dans la Critique de la faculté de juger en l’appliquant au jugement esthétique.

Le Sensus Communis Esthétique

Le jugement de goût prétend à l’universalité subjective : en disant « cette rose est belle », je postule l’accord de tous les sujets dotés de sensus communis.

L’Universalité sans Concept

Cette universalité ne repose sur aucun concept déterminé mais sur la communicabilité universelle du sentiment esthétique.

Hegel et la Critique du Bon Sens

Georg Wilhelm Friedrich Hegel critique vigoureusement le bon sens dans la Phénoménologie de l’esprit.

L’Illusion du Naturel

Le bon sens croit posséder immédiatement la vérité, ignorant la médiation historique et dialectique de toute connaissance.

La Conscience Malheureuse

Hegel montre que le bon sens exprime souvent une conscience « malheureuse » qui refuse l’effort du concept et se contente d’évidences non critiquées.

Marx et l’Idéologie

Karl Marx révèle dans L’Idéologie allemande comment le « bon sens » peut véhiculer l’idéologie dominante.

La Fausse Évidence

Ce qui paraît évident au bon sens (propriété privée, salariat) résulte en fait de rapports sociaux historiques qui se naturalisent.

La Critique de l’Idéologie

Marx démasque les fausses évidences du bon sens bourgeois par l’analyse matérialiste des conditions sociales de production.

Gramsci et l’Hégémonie

Antonio Gramsci développe dans les Cahiers de prison une analyse de l’hégémonie culturelle qui passe par le « sens commun. »

Le Sens Commun comme Terrain de Lutte

Le sens commun constitue le terrain où s’affrontent conceptions du monde dominantes et subalternes. La révolution culturelle doit transformer le sens commun populaire.

Gadamer et la Réhabilitation

Hans-Georg Gadamer réhabilite le bon sens dans Vérité et Méthode contre les prétentions scientistes.

Le Sensus Communis Herméneutique

Gadamer retrouve la tradition humaniste du sensus communis comme faculté de juger en situation sans règles universelles prédéterminées.

La Sagesse Pratique

Cette faculté s’apparente à la phronesis aristotélicienne : sagesse pratique irréductible au savoir technique.

Arendt et le Jugement

Hannah Arendt développe dans La Crise de la culture une théorie du jugement inspirée de Kant.

Le Sens Commun Politique

Arendt lie le sens commun à la faculté de juger en politique : capacité de distinguer sans règles prédéterminées dans l’espace public.

La Pensée sans Garde-fous

Après l’effondrement des traditions, le jugement doit s’exercer « sans garde-fous », révélant l’importance cruciale du sens commun.

La Philosophie Analytique

Moore et les Évidences Ordinaires

George Edward Moore défend dans « Défense du sens commun » l’autorité épistémique des croyances ordinaires contre le scepticisme philosophique.

Wittgenstein et les Certitudes

Ludwig Wittgenstein montre dans De la certitude que certaines propositions du sens commun (« J’ai deux mains ») fondent nos jeux de langage sans pouvoir être elles-mêmes justifiées.

Les Sciences Cognitives

Les Heuristiques

Daniel Kahneman et Amos Tversky révèlent que le « bon sens » utilise des heuristiques (raccourcis mentaux) efficaces mais parfois biaisées.

L’Intelligence Pratique

Les recherches sur l’intelligence pratique montrent l’efficacité adaptative du bon sens dans les situations complexes et incertaines.

Critiques Contemporaines

Le Relativisme Culturel

L’anthropologie révèle la variabilité culturelle de ce qui passe pour « bon sens », questionnant son universalité prétendue.

L’Épistémologie Féministe

Les épistémologues féministes dénoncent le « bon sens » masculin qui naturalise la domination patriarcale.

La Sociologie de la Connaissance

La sociologie révèle les conditions sociales de production du « bon sens » et ses fonctions idéologiques.

Défenses du Bon Sens

La Sagesse Évolutive

Certains philosophes soutiennent que le bon sens résulte de l’évolution et incorpore une sagesse adaptative millénaire.

L’Universalité Minimale

D’autres défendent l’existence d’un noyau universel de bon sens transculturel, condition de la communication humaine.

Le bon sens demeure une notion ambivalente qui oscille entre sagesse naturelle et préjugé non critiqué. Il révèle la tension entre l’exigence démocratique d’accessibilité de la vérité et la nécessité critique de l’examen rationnel de nos évidences spontanées.

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