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  1. Définition et étymologie
  2. L’ontologie en philosophie
    1. Les origines présocratiques
    2. Platon et l’ontologie des Idées
    3. Aristote et l’ontologie de la substance
    4. L’ontologie médiévale : essence et existence
    5. L’ontologie moderne : substance et attributs
    6. Kant et la révolution copernicienne
    7. Hegel et l’ontologie dialectique
    8. Heidegger et la destruction de l’ontologie traditionnelle
    9. Les ontologies contemporaines
    10. L’ontologie sociale
  3. Enjeux contemporains
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Ontologie

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Définition et étymologie

L’ontologie désigne la branche de la philosophie qui étudie l’être en tant qu’être, c’est-à-dire les structures fondamentales de la réalité et les modes d’existence des différents types d’entités. Elle s’interroge sur ce qui existe, sur les manières d’exister, et sur les relations entre les différents ordres d’être.

C’est donc l’étude de ce qui existe et de la nature de l’être. Autrement dit, l’ontologie cherche à répondre à la question : « Qu’est-ce qui est réel, et en quel sens ? »

Le terme « ontologie » est relativement récent dans l’histoire de la philosophie. Il fut forgé au XVIIe siècle par le philosophe allemand Jacob Lorhard (1606), puis popularisé par Christian Wolff au XVIIIe siècle. Il est composé du grec on (ὄν), participe présent du verbe einai (être), et du suffixe -logia (-λογία) qui signifie « discours » ou « science ». L’ontologie est donc littéralement la « science de l’être » ou le « discours sur l’être ».

Cependant, si le mot est moderne, la discipline qu’il désigne remonte aux origines de la philosophie. Aristote, dans sa Métaphysique, définissait déjà ce qu’il appelait la « philosophie première » comme « la science de l’être en tant qu’être » (to on hê on), formule qui demeure la définition classique de l’ontologie.

L’ontologie en philosophie

Les origines présocratiques

La réflexion ontologique naît avec les premiers philosophes grecs qui s’interrogent sur la nature ultime de la réalité. Parménide, dans son Poème, établit les fondements de l’ontologie occidentale en affirmant l’identité de l’être et de la pensée : « Car c’est la même chose que penser et être. » Il énonce les attributs fondamentaux de l’être : un, éternel, immobile, indivisible.

Cette ontologie parménidienne pose le problème central de la philosophie : comment concilier l’unité de l’être avec la multiplicité du devenir ? Héraclite avait déjà souligné la primauté du devenir (« On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve »), tandis que Parménide affirme la primauté de l’être permanent. Cette tension structure toute l’histoire de l’ontologie.

Platon et l’ontologie des Idées

Platon résout le conflit entre Héraclite et Parménide en développant une ontologie dualiste. Dans la République et le Phédon, il distingue deux niveaux de réalité : le monde sensible, caractérisé par le devenir et la multiplicité, et le monde intelligible des Idées, caractérisé par l’être permanent et l’unité.

Les Idées platoniciennes possèdent la plénitude ontologique : elles sont les modèles éternels et parfaits dont les choses sensibles ne sont que des copies imparfaites. Cette ontologie hiérarchique établit une gradation dans l’être, de la pure non-être (le néant) à l’être suprême (l’Idée du Bien), en passant par l’être sensible intermédiaire.

L’allégorie de la Caverne illustre cette conception : la réalité véritable n’est pas le monde des apparences sensibles mais celui des essences intelligibles, accessible par la dialectique philosophique.

Aristote et l’ontologie de la substance

Aristote, tout en gardant la question parménidienne de « l’être en tant qu’être », critique le dualisme platonicien. Dans sa Métaphysique, il développe une ontologie de la substance (ousia) qui réconcilie unité et multiplicité dans le monde sensible lui-même.

La substance aristotélicienne est ce qui existe par soi et sert de support aux accidents. Elle se dit selon plusieurs sens : la substance première (l’individu concret), la substance seconde (l’espèce et le genre), la matière, la forme et le composé de matière et de forme. Cette doctrine hylémorhique explique l’être des choses sensibles sans recours à un monde séparé d’Idées.

Aristote établit également la doctrine des catégories, ces genres suprêmes de l’être : substance, quantité, qualité, relation, lieu, temps, position, possession, action, passion. Cette classification demeure influente dans l’ontologie occidentale.

L’ontologie médiévale : essence et existence

La philosophie médiévale, confrontée à la révélation religieuse, renouvelle les questions ontologiques. Saint Thomas d’Aquin, synthétisant Aristote et la doctrine chrétienne, développe une ontologie où se distinguent l’essence et l’existence.

Pour Thomas d’Aquin, dans les créatures, l’essence (ce qu’est la chose) et l’existence (le fait qu’elle soit) sont réellement distinctes. Seul en Dieu essence et existence s’identifient, faisant de lui l’être par soi (esse per se). Cette distinction fonde une ontologie de la participation : les créatures participent à l’être divin selon leurs essences respectives.

Duns Scot développe une ontologie différente en affirmant l’univocité de l’être : l’être se dit de la même manière de Dieu et des créatures, mais selon des modes différents (infini/fini, nécessaire/contingent).

L’ontologie moderne : substance et attributs

La philosophie moderne renouvelle l’ontologie en partant du sujet connaissant. René Descartes, dans ses Méditations métaphysiques, établit une ontologie dualiste fondée sur deux substances : la res extensa (substance étendue) et la res cogitans (substance pensante).

Cette ontologie cartésienne pose le difficile problème de l’union de l’âme et du corps, que les successeurs de Descartes tentent de résoudre : Malebranche par l’occasionnalisme, Leibniz par l’harmonie préétablie, Spinoza par le monisme substantiel.

Spinoza, dans son Éthique, radicalise l’ontologie cartésienne en affirmant l’existence d’une seule substance, Dieu ou la Nature (Deus sive Natura). Cette substance s’exprime selon une infinité d’attributs dont nous n’en connaissons que deux : la pensée et l’étendue. Cette ontologie moniste résout le dualisme cartésien mais soulève de nouvelles difficultés sur le statut des modes finis.

Kant et la révolution copernicienne

Emmanuel Kant révolutionne l’ontologie en montrant ses limites dans la Critique de la raison pure. Il distingue les phénomènes (objets tels qu’ils nous apparaissent) des noumènes (choses en soi), montrant que la connaissance ontologique ne peut porter que sur les premiers.

Cette « révolution copernicienne » substitue à l’ontologie dogmatique une philosophie transcendantale qui étudie les conditions a priori de l’objectivité. Kant ne supprime pas l’ontologie mais en délimite rigoureusement le domaine de validité.

Hegel et l’ontologie dialectique

Georg Wilhelm Friedrich Hegel, dans sa Science de la logique, développe une ontologie dialectique où l’être se révèle dans son devenir. L’être pur, privé de toute détermination, est identique au néant pur. Cette identité engendre le devenir comme vérité de l’être et du néant.

L’ontologie hégélienne est processuelle : l’être n’est pas donné d’emblée mais se constitue dans le mouvement dialectique de la négation de la négation. Cette conception influence profondément l’ontologie contemporaine.

Heidegger et la destruction de l’ontologie traditionnelle

Martin Heidegger, dans Être et temps (1927), opère une « destruction » de l’histoire de l’ontologie occidentale. Il montre que la métaphysique traditionnelle a oublié la différence ontologique entre l’être et l’étant, prenant l’être pour un étant suprême.

Heidegger propose une « ontologie fondamentale » qui part de l’analyse du Dasein (être-là) humain comme étant privilégié dans sa compréhension de l’être. Cette analytique existentiale révèle les structures ontologiques fondamentales : l’être-au-monde, l’être-avec, l’être-vers-la-mort.

Cette approche renouvelle complètement l’ontologie en partant de la finitude et de la temporalité plutôt que de la substance éternelle.

Les ontologies contemporaines

La philosophie analytique développe de nouvelles approches ontologiques. Willard Van Orman Quine reformule la question ontologique : « Qu’est-ce qui existe ? » devient « À quoi nous engageons-nous ontologiquement ? ». Il propose le critère de l’engagement ontologique : être, c’est être la valeur d’une variable liée dans nos meilleures théories scientifiques.

David Armstrong développe une ontologie naturaliste fondée sur les états de choses (states of affairs), tentant de réconcilier réalisme scientifique et parcimonie ontologique.

Les ontologies formelles, développées en informatique et en intelligence artificielle, renouvellent les questions ontologiques en proposant des formalisations rigoureuses des catégories d’objets et de leurs relations.

L’ontologie sociale

John Searle développe une ontologie de la réalité sociale qui distingue les faits bruts (physiques) des faits institutionnels (sociaux). Ces derniers existent par la reconnaissance collective et obéissent à la structure logique « X compte comme Y dans le contexte C ».

Cette ontologie sociale étudie l’existence d’entités comme l’argent, le mariage, les États, qui n’existent que par l’accord intersubjectif tout en ayant des effets réels.

Enjeux contemporains

L’ontologie contemporaine affronte de nouveaux défis : l’émergence des ontologies numériques en informatique, les questions posées par la physique quantique sur la nature de la réalité, l’ontologie des objets virtuels et numériques, les problèmes soulevés par les biotechnologies sur le statut ontologique du vivant.

Ces développements renouvellent les questions ontologiques fondamentales tout en confirmant la centralité de la question de l’être dans la réflexion philosophique. L’ontologie demeure ainsi une discipline philosophique majeure qui irrigue tous les autres domaines de la pensée.

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