Définition et Étymologie
Le terme Zététique provient du grec ancien (zētētikós), qui signifie « qui aime chercher », « qui recherche » ou « qui enquête ». Ce mot est lui-même dérivé du verbe (zēteîn), « chercher ». La zététique est, littéralement, l’art de la recherche, caractérisé par une attitude de doute méthodique.
Dans son acception moderne, popularisée en France par le physicien Henri Broch, la zététique désigne une démarche intellectuelle et scientifique rigoureuse appliquée à l’examen des phénomènes réputés « paranormaux », des pseudo-sciences et des affirmations extraordinaires. C’est « l’art du doute ».
Elle se distingue du scepticisme radical, qui pourrait affirmer l’impossibilité d’atteindre la vérité. La zététique n’est pas une fin en soi, mais une méthode. Elle ne dit pas « nous ne pouvons rien savoir », mais « que savons-nous réellement de cette affirmation et comment pouvons-nous la vérifier ? ». Elle suspend son jugement jusqu’à ce que des preuves tangibles et vérifiables soient apportées. Son principe fondamental pourrait être résumé par la formule : « Une affirmation extraordinaire nécessite une preuve plus qu’ordinaire ».
Usage en Philosophie et en Sciences
Bien que le terme ait été remis au premier plan récemment, son origine est profondément philosophique.
L’Origine Sceptique
Dans l’Antiquité grecque, les Zététiques étaient le nom que se donnaient les disciples de Pyrrhon d’Élis, les philosophes sceptiques. Pour eux, la zététique était la recherche continue de la vérité, une recherche qui, constatant l’égale force des arguments opposés sur tout sujet, aboutissait à l’épochè, la suspension du jugement. Cette suspension, en libérant l’esprit de l’agitation du dogmatisme, devait mener à l’ataraxie, l’absence de troubles et la paix de l’âme. La zététique était donc, à l’origine, une voie philosophique vers la sérénité par l’exercice du doute.
La Zététique Moderne : l’Hygiène du Jugement
L’usage moderne du terme, relancé dans les années 1980, est moins métaphysique et plus méthodologique. Il est directement lié à l’application du scepticisme scientifique et de la méthode expérimentale. La zététique s’est constituée comme une « autodéfense intellectuelle » face à la prolifération des croyances irrationnelles, des thérapies alternatives non prouvées, des théories du complot et des superstitions.
La démarche zététique repose sur plusieurs piliers fondamentaux.
Premièrement, la charge de la preuve. C’est à celui qui affirme l’existence d’un phénomène (télépathie, fantômes, pouvoirs de guérison) de fournir la preuve de son affirmation. Ce n’est pas au sceptique de prouver que le phénomène n’existe pas, car prouver une inexistence est souvent logiquement impossible.
Deuxièmement, la méthode expérimentale. La zététique exige que les affirmations soient testables, c’est-à-dire réfutables (au sens de Karl Popper). Si une théorie ne peut, par aucun moyen, être testée pour prouver qu’elle est fausse, alors elle n’est pas scientifique. Elle applique des protocoles rigoureux, comme les tests en double aveugle, pour éliminer les biais.
Troisièmement, la recherche d’explications parcimonieuses (le rasoir d’Ockham). Face à un phénomène étrange, le zététicien cherche d’abord l’explication la plus simple et la plus économique en hypothèses nouvelles. Avant de postuler une intervention extraterrestre pour expliquer des lumières dans le ciel, il vérifiera les hypothèses de rentrée atmosphérique, de drones, de ballons-sondes ou de phénomènes météorologiques.
Enfin, la zététique s’appuie massivement sur la psychologie cognitive pour expliquer pourquoi nous croyons à des choses fausses. Elle étudie les biais cognitifs, les illusions d’optique, la tendance du cerveau à voir des schémas là où il n’y en a pas (paréidolie), l’effet placebo ou la force du témoignage et de l’anecdote.
En France, la zététique est notamment représentée par des structures comme le Laboratoire de Zététique de l’Université de Nice (fondé par Henri Broch) ou des associations comme l’Observatoire Zététique et le CORTECS (Collectif de recherche transdisciplinaire esprit critique et sciences). Elle est une discipline à la croisée de l’épistémologie, de la physique et de la psychologie, visant à promouvoir l’esprit critique comme une hygiène préventive du jugement.