Définition et Étymologie
Le terme Vie provient du latin vita, qui désigne l’existence, la durée de l’existence, ou encore la manière de vivre. Ce terme latin est lui-même apparenté au grec bios, qui signifie la manière de vivre, la biographie (l’histoire d’une vie spécifique), et à zoè, qui désigne le fait simple de vivre, la vie comme principe commun à tous les êtres animés, l’opposé de la mort.
Au sens biologique, la vie est la propriété caractéristique des organismes, depuis la bactérie jusqu’à l’être humain, qui se distinguent de la matière inerte. Un être vivant est un système organisé, souvent à base de cellules, capable d’échanger de la matière et de l’énergie avec son environnement par le métabolisme. Il se caractérise par la croissance, l’adaptation à son milieu, la réponse aux stimuli et, de manière cruciale, la capacité de se reproduire et de transmettre une information génétique, assurant ainsi la continuité de la vie à travers le temps. La vie est un processus dynamique d’auto-organisation et d’auto-conservation.
En philosophie, la définition de la vie dépasse largement ce cadre biologique. Elle devient une question métaphysique : qu’est-ce que ce principe qui anime la matière ? Et une question éthique : qu’est-ce qu’une « vie bonne », une vie qui mérite d’être vécue ?
Usage en Philosophie
La philosophie s’est toujours efforcée de saisir l’essence de la vie, oscillant entre des explications matérialistes et des approches spiritualistes ou vitalistes.
Pour Aristote, la vie n’est pas un objet ou une substance ajoutée au corps ; elle est le principe même de son organisation. Il définit l’âme (psychè) comme « l’acte premier d’un corps naturel organisé ». L’âme est ce qui fait qu’un corps est vivant, fonctionnel et unifié. Il établit une hiérarchie des fonctions de la vie : l’âme végétative (commune aux plantes) assure la nutrition et la reproduction ; l’âme sensitive (commune aux animaux) y ajoute la sensation, le désir et le mouvement ; l’âme rationnelle (propre à l’homme) couronne le tout avec la pensée et l’intellect.
À l’âge classique, René Descartes propose une rupture radicale en adoptant une posture mécaniste. Pour lui, la matière inerte et la matière vivante obéissent aux mêmes lois physiques. Le corps, qu’il soit humain ou animal, est une machine complexe, un automate sophistiqué dont les fonctions s’expliquent par l’agencement de ses « organes et ressorts ». La vie, au sens biologique, est réduite à un pur mécanisme. C’est la théorie de l' »animal-machine ». Chez l’homme, seul l’esprit pensant (res cogitans) échappe à ce mécanisme.
En réaction à ce réductionnisme, le vitalisme réaffirme l’irréductibilité de la vie. Des penseurs comme Henri Bergson au début du vingtième siècle soutiennent que la vie ne peut être comprise ni par la seule physique, ni par la seule logique. Dans L’Évolution créatrice, Bergson postule un Élan vital. La vie n’est pas un état, mais une impulsion, un courant de conscience créatrice qui traverse la matière pour y introduire de l’indétermination et de la nouveauté. L’évolution n’est pas seulement une adaptation mécanique, elle est une création imprévisible de formes nouvelles. La vie est essentiellement durée, changement et invention.
Dans une perspective métaphysique différente, Arthur Schopenhauer identifie l’essence du monde à un Vouloir-vivre aveugle et insatiable. C’est une pulsion unique qui anime tout l’univers, de la pierre qui tombe à l’homme qui désire. Pour Schopenhauer, cette force est la source de toute souffrance, car ce vouloir est un désir perpétuel qui ne peut jamais être comblé. La vie est donc une oscillation constante entre la souffrance du désir et l’ennui de la satisfaction.
Friedrich Nietzsche renverse cette perspective pessimiste. Il fait de la vie la valeur suprême, l’étalon de toutes les autres valeurs. Il critique la morale traditionnelle, le platonisme et la religion, qu’il accuse d’être des entreprises de dévalorisation de la vie terrestre, des « calomnies » contre le corps et l’existence au nom d’un « arrière-monde » illusoire. La vie véritable n’est pas une simple survie, mais Volonté de Puissance : une force d’affirmation, de création et de dépassement de soi. Le devoir suprême est de « dire oui » à la vie dans sa totalité, y compris sa douleur et sa tragédie.
Enfin, la philosophie politique récente, avec Michel Foucault, a montré comment la vie elle-même est devenue un enjeu de pouvoir. Il forge le concept de biopolitique pour décrire une forme de pouvoir moderne qui ne se contente pas de menacer de mort (pouvoir souverain), mais qui cherche à gérer, administrer et optimiser la vie des populations : santé publique, taux de natalité, hygiène, etc. La vie biologique, la zoè, entre dans le champ de la politique.





