En 1969, Paul Ricœur publie « Le Conflit des interprétations », un ouvrage qui transforme profondément la philosophie herméneutique en l’ouvrant aux sciences humaines et en montrant que l’interprétation n’est pas une méthode unique mais un champ de tensions fécondes.
En raccourci…
Lorsque Paul Ricœur publie « Le Conflit des interprétations » en 1969, il bouleverse la tradition philosophique en proposant une approche radicalement nouvelle de l’herméneutique. Plutôt que de chercher une méthode unique d’interprétation, il affirme que comprendre un texte, un symbole ou une action humaine implique nécessairement un conflit entre différentes lectures possibles. Ce conflit n’est pas un échec, mais la condition même de toute interprétation authentique.
Ricœur dialogue avec trois grands courants de son époque : la psychanalyse freudienne qui déchiffre les symboles comme des masques cachant des désirs refoulés, le structuralisme qui analyse les systèmes de signes indépendamment des intentions subjectives, et la phénoménologie qui cherche à saisir le sens vécu des expériences.
Au lieu d’opposer ces approches, Ricœur montre qu’elles sont complémentaires. Un symbole possède toujours plusieurs niveaux de sens : un sens immédiat et un sens caché, une structure objective et une dimension subjective vécue. L’herméneutique ricœurienne refuse donc les simplifications : ni transparence totale du sens, ni opacité radicale, mais un travail patient de déchiffrement qui accepte la complexité. Cette pensée reste d’une actualité brûlante à une époque où se multiplient les conflits d’interprétation sur les textes, les événements historiques, les symboles culturels.
Le contexte philosophique d’une œuvre charnière
Pour saisir l’importance du « Conflit des interprétations », il faut comprendre le paysage intellectuel de la France à la fin des années 1960. La philosophie française traverse une période de transformations majeures. La phénoménologie, dominante depuis les années 1930 avec Husserl puis Sartre et Merleau-Ponty, voit son hégémonie contestée par le structuralisme triomphant de Lévi-Strauss, Barthes et Lacan.
Paul Ricœur se trouve à la croisée de ces débats, refusant de choisir un camp contre l’autre. Formé à la phénoménologie husserlienne, traducteur des « Ideen » de Husserl, il connaît intimement cette tradition. Mais il perçoit aussi ses limites : la phénoménologie prétend accéder directement au sens vécu, à l’intentionnalité de la conscience, comme si le sujet pouvait se rendre transparent à lui-même.
Or, Freud a montré que la conscience se méconnaît, que nos intentions cachent d’autres intentions, que le sens manifeste dissimule un sens latent.
Parallèlement, le structuralisme propose une méthode qui évacue le sujet pour se concentrer sur les structures objectives du langage, des mythes, de l’inconscient.
Pour Lévi-Strauss, les mythes se pensent entre eux, indépendamment de ceux qui les racontent. Pour Lacan, l’inconscient est structuré comme un langage, ce qui déplace radicalement la question du sens hors de la conscience subjective.
Ricœur refuse cette double impasse : ni la naïveté d’une conscience transparente à elle-même, ni l’évacuation pure et simple du sujet. Sa stratégie consiste à intégrer les acquis critiques de la psychanalyse et du structuralisme tout en maintenant l’exigence phénoménologique de retour au sens vécu. C’est ce qu’il appelle une « greffe de l’herméneutique sur la phénoménologie ».
Le symbole comme énigme
Au centre de l’ouvrage se trouve une réflexion sur le symbole. Pour Ricœur, le symbole se définit par une structure de double sens : il possède un sens littéral, immédiat, et un sens second, figuré, qui ne peut être atteint qu’à travers le premier. Le symbole donne à penser parce qu’il dit plus qu’il ne dit explicitement.
Prenons l’exemple du symbole de la souillure dans les rituels de purification. Au sens littéral, il s’agit d’une tache physique qu’il faut nettoyer. Mais ce sens littéral porte un sens second : la faute morale, la culpabilité, l’impureté spirituelle. On ne peut accéder à ce sens second qu’en passant par le premier, mais on ne peut s’en tenir au premier sans manquer l’essentiel.
Cette structure du symbole pose un défi à toute philosophie du sens. On ne peut ni réduire le symbole à son sens littéral (ce serait manquer sa dimension symbolique), ni sauter directement au sens second en ignorant le sens premier (ce serait faire du symbole une simple allégorie transparente). Le symbole résiste à la compréhension immédiate, il exige un travail d’interprétation.
C’est ici qu’intervient le conflit. Car face à un symbole, plusieurs interprétations sont possibles. La psychanalyse y voit l’expression déguisée d’un désir refoulé. La phénoménologie religieuse y reconnaît une manifestation du sacré. L’anthropologie structurale y analyse un système d’oppositions binaires. Chacune de ces lectures éclaire une dimension du symbole, mais aucune ne l’épuise.
Les deux herméneutiques : restauration et suspicion
Ricœur introduit une distinction qui devient centrale pour toute sa philosophie : celle entre herméneutique de la restauration et herméneutique du soupçon. Cette distinction organise le conflit des interprétations en deux grands pôles opposés mais complémentaires.
L’herméneutique de la restauration est celle qui fait confiance au symbole, qui cherche à recueillir son message, à déployer ses richesses de sens. C’est l’approche de Mircea Eliade dans son étude des symboles religieux, ou celle de la phénoménologie religieuse en général. Cette herméneutique postule que le symbole dit quelque chose de vrai sur la condition humaine, sur notre rapport au sacré, au cosmos, à l’existence.
À l’opposé, l’herméneutique du soupçon ne fait pas confiance au sens manifeste. Elle considère que ce qui se donne comme sens cache autre chose, que derrière les belles apparences se dissimulent des mécanismes inavoués. Ricœur identifie trois grands maîtres du soupçon : Marx, Nietzsche et Freud.
Pour Marx, les productions culturelles (religion, philosophie, art) sont des superstructures qui dissimulent et légitiment les rapports de production économiques. La religion est l’opium du peuple, une illusion qui console de l’exploitation réelle.
Pour Nietzsche, les valeurs morales (le bien, la vérité, la compassion) cachent la volonté de puissance, particulièrement celle des faibles qui se vengent des forts en créant une morale qui condamne la force.
Pour Freud, la conscience masque l’inconscient. Les rêves, les lapsus, les symptômes névrotiques sont des formations de compromis qui expriment de manière déguisée des désirs que la censure psychique interdit.
La psychanalyse comme herméneutique
Le dialogue de Ricœur avec la psychanalyse occupe une place centrale dans « Le Conflit des interprétations ». Il consacre plusieurs essais majeurs à Freud, cherchant à la fois à reconnaître la pertinence de sa méthode et à en montrer les limites philosophiques.
Ricœur reconnaît que Freud a profondément transformé notre compréhension du sens. Avant la psychanalyse, on pouvait croire que comprendre un texte ou un symbole consistait simplement à saisir l’intention de son auteur. Freud montre que cette intention consciente recouvre d’autres intentions inconscientes, que le sens manifeste est toujours aussi un masque.
Le rêve en est l’exemple paradigmatique. Le rêve tel qu’il est raconté (le contenu manifeste) résulte d’un travail de déformation appliqué aux pensées latentes du rêve. La symbolisation onirique n’exprime pas directement un sens, elle le déguise pour tromper la censure. Interpréter un rêve, c’est donc remonter du manifeste au latent, déchiffrer le code qui transforme le désir en image acceptable.
Cette herméneutique psychanalytique repose sur une économique du désir. Les symboles ne sont pas des signes arbitraires, ils sont investis de force pulsionnelle. Comprendre un symbole, c’est comprendre comment il cristallise, détourne, sublime ou refoule la libido. L’interprétation n’est donc jamais purement intellectuelle, elle touche aux forces vitales qui nous meuvent.
Cependant, Ricœur refuse de réduire toute interprétation au modèle psychanalytique. Si tout symbole cachait toujours un désir refoulé, l’herméneutique deviendrait une technique de démystification systématique. Or, certains symboles ouvrent réellement vers des significations qui débordent l’économie du désir. Le symbole religieux, par exemple, ne se laisse pas entièrement ramener à une projection de l’imago paternelle, même s’il comporte cette dimension.
Le structuralisme et la question du sujet
Le dialogue avec le structuralisme s’avère tout aussi crucial. Lévi-Strauss propose une méthode d’analyse des mythes qui révolutionne l’anthropologie. Pour lui, un mythe n’exprime pas directement les intentions de ceux qui le racontent, il actualise une structure sous-jacente faite d’oppositions binaires (nature/culture, cru/cuit, etc.). Les mythes d’une société forment un système où chaque élément n’a de sens que par sa position relative aux autres.
Cette approche structurale possède une vertu critique indéniable : elle montre que le sens n’est jamais donné de manière atomique, mais toujours pris dans des réseaux de relations différentielles. Elle permet d’analyser rigoureusement des corpus complexes en mettant au jour leurs structures invariantes.
Ricœur admire la rigueur de la méthode structurale, mais il en pointe les limites philosophiques. Le structuralisme évacue la question du sujet parlant, du locuteur qui actualise la langue dans la parole. Il analyse des systèmes synchroniques en suspendant la dimension diachronique, temporelle, de la culture. Il traite les symboles comme des signes dans un système formel, en ignorant leur enracinement dans l’expérience vécue.
Or, pour Ricœur, on ne peut durablement suspendre la question du sujet. Les structures ne flottent pas dans le vide, elles sont actualisées par des sujets parlants, agissants, interprétants. Une analyse structurale peut être une étape nécessaire de la compréhension, mais elle ne peut être l’étape finale. Il faut revenir du système au sujet, de la structure à l’événement de parole.
Cette insistance sur le sujet ne signifie pas un retour naïf à la philosophie de la conscience. Le sujet ricœurien n’est pas un ego transparent à lui-même, c’est un soi qui se comprend à travers les signes, les symboles, les textes qu’il interprète. Le soi n’est donné qu’indirectement, médiatement, à travers le détour par les œuvres de la culture.
La phénoménologie réflexive
La relation de Ricœur à la phénoménologie est complexe. Formé dans cette tradition, il en partage les ambitions fondamentales : retourner aux choses mêmes, décrire les structures de l’expérience vécue, élucider les modes de donation du sens. Mais il critique la prétention de la phénoménologie husserlienne à une intuition directe, à une saisie immédiate du sens par une conscience transparente à elle-même.
La leçon de Freud et de Marx est que la conscience se méconnaît, que l’immédiat est toujours déjà médiatisé. On ne peut accéder au sens vécu qu’à travers le détour par les signes, les symboles, les institutions, les textes. C’est ce que Ricœur appelle le « long détour » herméneutique : pour revenir à soi, pour comprendre ce que nous sommes, nous devons passer par l’interprétation des œuvres dans lesquelles la vie humaine s’objective.
Cette « greffe de l’herméneutique sur la phénoménologie » transforme profondément le projet phénoménologique. Il ne s’agit plus de décrire directement les vécus de conscience, mais d’interpréter les expressions de la vie. La phénoménologie devient herméneutique, c’est-à-dire théorie de l’interprétation.
Ricœur développe ainsi ce qu’il appelle une « phénoménologie réflexive ». Réflexive parce qu’elle maintient l’exigence d’un retour à soi, d’une appropriation par le sujet de son propre sens. Mais cette réflexion est médiatisée par l’interprétation. Le cogito ricœurien n’est pas celui de Descartes, immédiatement certain de soi. C’est un cogito blessé, qui se découvre à travers le miroir déformant des signes et des symboles.
La dialectique de l’explication et de la compréhension
Un des apports majeurs du « Conflit des interprétations » concerne l’articulation entre explication et compréhension. Depuis Dilthey, les sciences humaines se distinguent des sciences de la nature par leur méthode : comprendre plutôt qu’expliquer, saisir le sens vécu plutôt que d’établir des lois causales.
Ricœur refuse cette opposition trop tranchée. Il propose une dialectique où explication et compréhension se présupposent mutuellement. On ne peut comprendre un texte sans l’expliquer, c’est-à-dire sans analyser sa structure, ses codes, ses mécanismes. Inversement, on n’explique que pour mieux comprendre, l’analyse structurale n’est pas une fin en soi mais un détour méthodologique vers une compréhension approfondie.
Prenons l’exemple d’un texte littéraire. Une première lecture nous donne une compréhension intuitive, globale, mais souvent confuse. Pour approfondir cette compréhension, il faut expliquer le texte : analyser sa composition, ses figures de style, ses réseaux métaphoriques, ses références intertextuelles. Cette explication structurale produit un savoir objectif sur le texte. Mais ce savoir ne devient pleinement significatif que lorsqu’il nourrit une compréhension nouvelle, plus riche, plus nuancée que la première.
Cette dialectique permet à Ricœur de concilier des approches apparemment incompatibles. Il peut utiliser l’analyse structurale sans renoncer à la dimension subjective du sens. Il peut pratiquer l’herméneutique du soupçon sans abandonner l’herméneutique de la restauration. Le conflit des interprétations n’est pas une aporie, c’est une dynamique productive.
La question du texte et de l’écriture
Dans les derniers essais du « Conflit des interprétations », Ricœur commence à développer ce qui deviendra central dans ses œuvres ultérieures : une théorie du texte. Le texte n’est pas simplement une parole écrite, il possède des caractéristiques spécifiques qui transforment l’herméneutique.
La parole orale est liée à son contexte d’énonciation : on peut interroger le locuteur, clarifier les malentendus, ajuster le sens en fonction de la situation. Le texte écrit, lui, se détache de son contexte originel. L’auteur n’est plus là pour dire ce qu’il voulait dire. Le texte développe une autonomie sémantique : il signifie indépendamment de l’intention de son auteur.
Cette autonomie du texte a des conséquences importantes pour l’herméneutique. L’interprétation ne consiste pas à reconstituer les intentions psychologiques de l’auteur, mais à déployer les possibilités de sens inscrites dans le texte lui-même. Schleiermacher voulait « comprendre un auteur mieux qu’il ne s’est compris lui-même ». Ricœur radicalise cette formule : comprendre un texte, c’est souvent aller au-delà de ce que l’auteur croyait dire.
Le texte ouvre un monde, propose une manière d’habiter l’existence. Lire n’est pas seulement déchiffrer des signes, c’est s’exposer à cette proposition de monde, accepter d’être transformé par elle. L’herméneutique ricœurienne rejoint ici l’esthétique de la réception : le sens d’une œuvre se constitue dans la rencontre entre le texte et le lecteur.
L’actualité du conflit
Plus d’un demi-siècle après sa publication, « Le Conflit des interprétations » conserve une remarquable actualité. Notre époque est peut-être plus que jamais traversée par des conflits d’interprétation. Sur les réseaux sociaux, dans les débats politiques, dans les controverses académiques, on assiste à une multiplication des lectures concurrentes des mêmes textes, des mêmes événements, des mêmes symboles.
La tentation est grande, face à ces conflits, de tomber dans le relativisme : toutes les interprétations se vaudraient, il n’y aurait plus de critère pour les départager. Ricœur nous aide à résister à cette tentation. Le conflit des interprétations n’implique pas que tout se vaut. Certaines interprétations sont plus riches, plus fécondes, plus respectueuses de la complexité du texte que d’autres. Certaines sont tout simplement fausses, même si on ne peut jamais atteindre une interprétation définitivement vraie.
L’herméneutique ricœurienne propose une voie entre le dogmatisme et le relativisme. Elle reconnaît la pluralité irréductible des lectures possibles tout en maintenant l’exigence d’argumentation rationnelle. Interpréter, c’est toujours proposer une lecture qu’on peut justifier, argumenter, confronter à d’autres lectures. Le conflit est fécond précisément parce qu’il nous oblige à affiner nos arguments, à prendre en compte ce que d’autres ont vu et que nous avions négligé.
L’herméneutique comme philosophie
Au-delà de ses contributions spécifiques à l’interprétation des textes ou des symboles, « Le Conflit des interprétations » esquisse une philosophie d’ensemble. Pour Ricœur, l’herméneutique n’est pas une discipline régionale qui s’occuperait de certains objets particuliers (les textes littéraires, les symboles religieux). Elle est une dimension fondamentale de l’existence humaine.
Nous sommes des êtres interprétants. Nous ne vivons pas dans un monde de faits bruts, mais dans un univers de sens toujours déjà interprété. Nos actions elles-mêmes sont des textes que nous et les autres interprétons. L’identité personnelle n’est pas une donnée immédiate, c’est une construction narrative qui résulte de nos interprétations successives de ce que nous avons vécu.
Cette dimension herméneutique de l’existence implique une finitude constitutive. Nous n’avons jamais accès à un sens absolu, transparent, définitif. Toute compréhension reste partielle, provisoire, ouverte à révision. Cette finitude n’est pas un échec, c’est la condition de notre historicité, de notre insertion dans une tradition vivante qui se transforme à travers nos réinterprétations.
En ce sens, l’herméneutique ricœurienne rejoint certaines intuitions de Gadamer, autre grande figure de l’herméneutique contemporaine. Pour Gadamer comme pour Ricœur, comprendre n’est jamais une opération méthodique qui garantirait un résultat objectif. C’est un événement qui nous arrive, une fusion d’horizons entre le monde du texte et notre monde propre, une expérience qui nous transforme autant qu’elle transforme notre compréhension du texte.
Les prolongements d’une œuvre fondatrice
« Le Conflit des interprétations » n’est pas un point d’arrivée mais un point de départ dans l’œuvre de Ricœur. Les intuitions développées dans ce recueil d’essais seront approfondies dans ses grandes œuvres ultérieures : « La Métaphore vive » (1975) sur le langage figuré, les trois tomes de « Temps et récit » (1983-1985) sur la narration et l’identité, « Soi-même comme un autre » (1990) sur le sujet et l’éthique.
Mais déjà dans « Le Conflit des interprétations », on trouve les lignes de force de toute la philosophie ricœurienne : le refus des réductions simplificatrices, l’acceptation de la complexité, la recherche patiente de médiations entre des positions apparemment incompatibles, la conviction que la vérité émerge du conflit plutôt que de l’unanimité.
Cette philosophie du conflit fécond reste un modèle pour notre temps. Dans une époque où les positions se radicalisent, où chacun campe sur ses certitudes, Ricœur nous rappelle la vertu du dialogue, de l’écoute de l’autre, de l’ouverture à des lectures différentes des nôtres. Non pas par relativisme mou, mais parce que c’est dans la confrontation argumentée des interprétations que peut progresser notre compréhension.
L’herméneutique ricœurienne est finalement une pensée de la responsabilité. Responsabilité dans l’interprétation : justifier ses lectures, tenir compte des objections, reconnaître ses limites. Responsabilité dans l’existence : assumer que nous construisons le sens de nos vies à travers les récits que nous en faisons, que nous sommes comptables de ces interprétations devant les autres et devant nous-mêmes.
« Le Conflit des interprétations » demeure ainsi une œuvre fondatrice, qui a transformé non seulement la philosophie herméneutique, mais notre manière de penser le sens, le symbole, le texte, le sujet. À une époque saturée d’informations mais souvent pauvre en compréhension, la leçon ricœurienne conserve toute sa pertinence : interpréter demande du temps, de la patience, une acceptation de la complexité et du conflit. C’est à ce prix que nous pouvons espérer comprendre un peu mieux les textes qui nous parlent et, à travers eux, nous comprendre un peu mieux nous-mêmes.